Moi, Jasmine P, 29 ans et 48 mois, résidante du « Boutte dla map » au Québec ».

J’aimerais ça être conne. Juste parce que ça serait plus simple.

Si j’étais conne, ces phrases ne me seraient plus destinées : « Dors, pis arrête de penser! », « Veux-tu ben arrêter de te casser la tête avec ça! », « J’espère que tes enfants ne deviendront pas fous comme toi à se poser des questions de même! », « Prend des antidépresseurs, ça va te calmer! ».

Si j’étais conne, je ne m’inquièterais pas de l’avenir de mes enfants, de la manière dont je les élève, ni de l’éducation qu’ils ont à l’école. Je n’aurais pas non plus de regret à être incapable de leur donner un monde meilleur. Je ne voudrais pas faire de moi une meilleure personne, je n’apprendrais pas de mes grandes erreurs. Je resterais seulement là, à vivre ma vie sans me poser de questions. Je m’y serais faite à la longue j’imagine.

Si j’étais conne, je n’aurais pas peur des gens. J’aurais une confiance aveugle dans un monde où l’on a oublié le constructif du commentaire. Je ne serais pas sensible aux attaques trop personnelles et à la haine anonyme derrière un écran d’ordinateur.

J’aimerais ça être conne. Juste parce que ça serait plus simple.

Moi, Émile F, 39 ans, résidant d’un village au nord du Québec.

J’aimerais ça être cave. Juste parce que ce serait plus simple.

Si j’étais cave, ces mots ne me seraient pas destinés juste parce que j’ai des sentiments : « Fif! “Faible!», “Semblant d’homme! ».

Si j’étais cave, je dirais adieux à ma morale, je m’achèterais un complet à 5000 $ et je parlerais de combien j’ai déclaré sur mon T4  aux soupers entre amis. Je possèderais une femme qui ne parle pas trop, mais le soir j’irais voir ma maîtresse cochonne. Je m’y serais fait à la longue j’imagine.

Si j’étais cave, je n’aurais aucune considération pour mes intuitions et celles de ceux qui me sont proches. De toute manière, des émotions c’est inutile dans une société où l’on achète les gens.

Nous Jasmine P et Émile F, aimerions que vous preniez ce texte au deuxième degré, car c’est une simple caricature pour vous dire qu’il n’y a pas de mal à être complexe, contrasté et vraiment vivant. Dans les villages du Québec, nous sommes souvent marqué au fer chaud par le jugement de nos pairs. Ne laissez personne vous mépriser. Ne vous résignez jamais à une vie qui ne vous convient pas. Faites en sorte qu’il n’y ait pas de dichotomie.

« Une même chose a différentes faces selon qu’on la regarde différemment; et de là vient que les uns prennent plaisir à tout et les autres à rien. » Baltasar Gracian y Morales

Image: “Over the town” par Marc Chagall, 1918 (Wikipedia image)