Les régions sont un terreau fertile pour l’entrepreneuriat. Mais au moment où le manque de main d’oeuvre fait mal et l’attraction de nouveau résident est un défi de taille, comment mettre en place une stratégie de développement pour assurer une croissance économique et sociale dans nos milieux? J’ai reçu Frédéric Laurin, professeur d’économie à l’UQTR et chercheur à l’Institut de recherche sur les PME, en entrevue pour en parler sur mon balado Ruralia. Vous pouvez écouter l’entrevue complète de 30 minutes ici ou lire ce qui suit pour en avoir un très bon résumé!
Le message de Frédéric concernant l’attraction de main d’oeuvre? « Les entreprises doivent miser sur les avantages de la qualité de vie en région». Très d’accord avec lui, j’ai été ravie d’entendre que, face à la pénurie de main d’œuvre, le développement régional passe par une offre d’avantages qualitatifs plus que monétaires aux jeunes générations.
Le Bottom-up
Non seulement territoriale, il m’a appris qu’une bonne stratégie de développement régional part d’une approche politique « bottom-up ». La communauté étant la mieux placée pour savoir ce qui est bon pour elle, les actions sont beaucoup plus cohérentes si elles sont proposées par la communauté même, plutôt qu’à partir d’une approche « top-down » où un groupe de fonctionnaires placés dans des salles fermées dictent quoi faire aux régions.
Selon lui, les régions devraient s’organiser pour déterminer leurs propres stratégies de développement et ensuite, la diffuser aux paliers de gouvernement. Le but étant que les entreprises créent des emplois et des investissements dans leur région, j’ai aimé son opinion sur l’importance d’intégrer les entreprises dans la stratégie. Il n’aurait su mieux dire en affirmant qu’en région, « les meilleurs ambassadeurs sont nuls autres que M., Mme. Tout-le-Monde ». J’ai fortement acquiescé : se fier sur le maire qui risque de perdent ses élections n’est pas la meilleure astuce d’un bon développement.
Je n’étais pas surprise d’entendre que ce qui fonctionne en région, c’est la communauté qui partage une stratégie commune connue de tous. J’étais contente de savoir qu’on peut profiter «des gens qui peuvent écrire à leurs cousins, aux chefs d’entreprise de la région, au neveu qui se cherche une job… ». Par contre, j’ai (presque) tombé de ma chaise quand il m’a dit que ça prend minimum 10 ans pour faire un réel changement! Là, j’ai compris pourquoi ça prend des stratégies de développement stables et durables dans le temps. La politique ne peut assurément pas garantir cette stabilité, j’avoue qu’il faut mettre ça entre les mains de la communauté! Pour employer ses mots, il faut miser sur « la culture de coopération ».
C’est bien beau les stratégies « bottom-up » d’une culture de coopération, mais quel est le rôle du gouvernement? Il m’a répondu : un rôle de mobilisateur. « Le gouvernement mobilise les gens, les entreprises, l’économie sociale, la culture, tout le monde autour d’un projet commun ». J’étais heureuse d’apprendre qu’il existe des programmes pour innover, exporter, faire des gains de productivité ou encore pour imbriquer la communauté ensemble et assurer la cohérence des échanges. J’en ai conclu que le gouvernement devient une sorte de chef d’orchestre là où ça prend plus de cohérence et moins d’institutionnel.
Le marketing territorial
Et là, j’ai bien vu toute l’importance du marketing territorial dans le développement régional! J’ai bien ri quand il a dit ceci: « Oubliez les panneaux publicitaires sur le bord de l’autoroute en région; ça ne fonctionne pas! » Comme alternative, il a souligné l’importance de défendre son positionnement stratégique en fonction des avantages concurrentiels propres à chaque région et j’ai appuyé ce constat : tout comme il est connu que Montréal se spécialise en aéronautique et en technologie de l’information, il devrait être évident d’ancrer le domaine de spécialisation dans le marketing territorial afin de savoir ce qui se passe dans chaque région.
Puis, devant toute la portée de son discours autour de la culture de coopération, j’ai particulièrement apprécié quand il a mentionné l’exemple de Drummondville qui s’est relevée suite à la fermeture d’entreprises causant des centaines de pertes d’emploi dans l’industrie du textile. « Drummondville, c’est la nouvelle Beauce! » qu’il dit.
Et vous savez comment j’aime la Beauce! <3
Un excellent exemple d’entreprises qui se relèvent les manches, s’inventent un esprit de communauté, coopèrent ensemble et qui s’entraident dans une relation de confiance. Je retiens ceci de son discours : « Ce sont des prêts personnels entre collègues, des partages d’information entre entreprises, des échanges de personnel temporaires. C’est ça le secret en région! »
C’est dit : en région, il faut coopérer pour se développer! Entre entrepreneurs, aller au-delà des discussions du tournoi de golf ou du match de hockey d’la veille et travailler ensemble. Offrir une conciliation travail-famille, répandre ses avantages concurrentiels et se faire confiance dans la « business » : voilà la clé du développement régional!
Vous avez un sujet à me proposer? Un intervenant à interviewer? Une discussion à entamer?
Envoyez-moi vos suggestions à [email protected].
Une nouvel épisode du balado Ruralia est disponible en ligne les lundis toutes les deux semaines sur Soundcloud, iTunes, Google Play, TuneIn ou ici même sur le blogue.
Commentez!