Chéri: J’aurais le gout de manger des chips.
Moi: On en a plus, tu peux aller en chercher.
Chéri: L’épicerie est-elle ouverte?
Moi: Euh… attends, ils viennent de changer l’horaire! Je l’ai pris en photo dans mon téléphone, parce que je ne m’en rappelle jamais. On est mardi… ha non, elle ferme à 18h.
Chéri: Je vais aller au dépanneur alors.
Moi: Tu es sûre qu’il est ouvert à cette heure? Il est 21h30.
Chéri: Je pensais qu’il fermait à tous les soirs à 22h.
Moi: Moi je pensais qu’il fermait à tous les soirs à 23h, mais je me suis fais prendre dimanche passé, je n’ai pas pu mettre d’essence en revenant de chez ma copine à 21h. Il fermait à 20h finalement. Et le lendemain, il a ouvert à 7h et j’étais en retard à un rendez-vous! Donc, si on est mardi… il devrait prendre le même horaire que le dimanche? Il a dû fermer à 20h.
Chéri: Je vais me rendre pour voir et je vais moi aussi prendre l’horaire en photo tant qu’à y être.
Moi: Bon plan. Pis ramène-moi des céréales pour demain!
Chéri: Ils en vendent pas, c’est un p’tit dépanneur Cassy…
Moi: Ok…
Ceci est le récit d’une conversation banale, qui se déroule régulièrement chez nous, parfois à propos de la quincaillerie, d’autres fois de la pharmacie. Dans notre région, les commerçants changent les heures d’ouverture selon les saisons. Ils prennent aussi des heures de diner et de souper. Ils ferment boutique simplement, en plein milieu de la journée ou de la soirée. Genre entre 12h et 13h15 et 17h et 18h. Je ne sais pas pourquoi le 13h15, mais je l’ai vu! Souvent, c’est à la même heure où on peut y aller, parce qu’on travaille nous aussi à temps plein et que nos heures de pauses sont celles des repas, les seules possible à prendre pour nos commissions. Les restos aussi ont leur propre horaire: fermés les lundis et mardis ou en plein milieu de soirée quand il n’y a pas de client, pas de déjeuner les samedis matin, etc.
Joie. Surtout quand tu as des enfants et plus de Tylenol/lait/frootloops à la maison.
Avant, il n’y avait que la caisse qui avait des heures d’ouverture dans le sens contraire du monde. Maintenant, c’est TOUTE. Ce doit être ce qu’on appelle le “rythme plus doux” de la ruralité. Tout le monde a le droit de manger tranquillement à heure fixe tous les jours. Le client attendra, je mange. Bébé attendra, je mange. Seigneur que j’aimerais être capable de dire ça à la maison!!!
Je peste un peu parce que ça m’a causé des irritants, mais je ne veux pas convaincre les commerçants de changer leurs horaires de travail. Parce que malgré tout, je les envie. Ils sont capables de mettre un stop à des horaires de fou. Ils sont capables de choisir leur qualité de vie avant le profit.
Ils sont des funambules qui gardent leur équilibre entre le service à la clientèle et des semaines de travail raisonnables, l’appât du gain et le repos bien mérité.
Grâce à eux, je dois aussi revoir mon mode de vie basé sur l’urgence et la satisfaction instantanée de tous mes besoins. C’est un bel exercice.
La seule solution que j’ai trouvé pour m’adapter à cette situation est de prévoir pour qu’il ne manque rien à la dernière minute, de développer plus mon organisation familiale. Ça aussi, c’est un bel exercice! De toute façon, je suis trop bien élevée pour aller déranger quelqu’un pendant qu’il mange!