En se couchant, mon fils m’a dit qu’il s’ennuyait de papa. Il le dit déjà beaucoup moins souvent. Mais toutes les fois, ça me tord le cœur. On dit pour se rassurer que les enfants s’adaptent à tout, que le quotidien va finir par se reconstruire autrement et que vaut mieux deux parents séparés que deux parents malheureux ensemble.

C’est bien beau tout ça… Mais la culpabilité t’étouffe pareil quand ton bébé réclame l’autre. La dernière chose que tu veux c’est de lui faire vivre le manque si jeune et qu’il tombe toujours « dans ’ craque du divan ». Alors tu te torture à te demander si tu aurais pu faire autrement mieux. Tu penses avoir compris comment changer le cours du passé. Tu te dis que finalement, ça devait être pas si pire que ça, quand tu étais avec ton ex!

Tu croyais que ta vie était « starter » pour de bon. Que ça allait se passer comme dans le conte de fées que tu t’imaginais. Tu n’aurais jamais pensé que tu aurais pu te lever un matin en te demandant pourquoi l’Amour avait juste sacré le camp. Pourquoi d’un seul coup ton corps se raidissait dès qu’Il t’approchait, quand quelques années avant, tu brulais de désir pour Lui? Mais tu ne comprends toujours pas ce qui se passe. Tu sais seulement que tu dois t’en aller maintenant, sinon tu vas mourir à petit feu.

Après tu vas souper chez des amis qui sont amoureux depuis le secondaire, ils se construisent une grande maison parce qu’ils ont une petite fille de quelques mois. Ils sont complices, se trouvent beaux et ont des étoiles dans les yeux. Ils te font chier avec leur gros bonheur quand tu reviens dans ton 4 et demi, toute seule. Toi, tu tires le diable par la queue, à essayer de joindre les deux bouts pour payer les factures qui s’accumulent. Le chauffe-eau brise, le locataire d’en bas fait des siennes, le frigo ne fonctionne plus et tu ne sais plus comment brancher le DVD sur ton vieux système de son. Mais personne n’est là quand tu te roules en boule dans les marches du sous-sol à regarder le bordel.

Ton moral est comme une montagne russe qui chambranle. Ton fils vient te flatter les cheveux quand tu pleures de découragement dans ton lit le matin. Ce fils, il a 4 ans, mais il te chuchote « pleure pas maman, ça va bien aller, je suis là. » Tu te dis que c’est toi qui devrais lui dire ça, jamais, jamais lui. Tu ne vois plus quand ça va aller mieux.

Tu es désorganisé, tu tentes de réapprendre à vivre, mais on te dit que tu es girouette et que tu fais n’importe quoi. Tu en profites donc pour faire un sacré ménage! Un ménage de tes amis qui ne l’ont réellement jamais été, un ménage de tes valeurs, de tes rêves et de tes ambitions.

Alors peu à peu tu apprends à aimer la nouvelle personne que tu deviens. Tu es fière de toi et de tes choix. Finalement, tu comprends que tu es transformée et que tu deviens la femme que tu voulais être. Tu te fous des conventions et des apparences, tu vis la vie que tu voulais tant vivre, quand tu angoissais chaque nuit dans ton ancienne vie.

Tu finis aussi par souhaiter le bonheur de ton ex, cet ami, ce bon père pour ton enfant. Il est très différent de toi certes. Mais tu l’as tout de même choisi pour être ce père que ton fils réclame parfois. Ces réclamations prennent alors un tout autre sens, car tu vois la relation que vous avez réussi à tisser avec ce fils chacun de votre côté. Tu sais très bien que, dans ton ancienne vie, tu étais frustrée, et qu’avoir une mère en colère à longueur de journée, ça crée un vide encore plus profond qu’une garde partagée.

Maintenant, tu dois juste profiter du soleil qui prend de plus en plus de place dans tes journées. Tu dois juste respirer profondément quand ta solitude de parent monoparental reprend le dessus. Tu dois savoir que le bonheur marche vers toi maintenant.

Ça va bien aller…

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