Par Jérôme Gendreau

bancAu moment d’écrire ces lignes, je sirote un latté dans un café de la rue Saint-Germain, artère principale du centre-ville de Rimouski. Un jour de mai. Décidé de sauter dans mon char pour changer de décor. Ça m’arrive parfois d’avoir cette envie soudaine de partir sur un « nowhere » comme on dit. Un « roadtrip ». M’envoyer trois ou quatre cent kilomètres dans la gueule, si possible avec du soleil plein le pare-brise, une route panoramique et de la bonne musique. Que ça soit, dans le Maine ou au Québec, ces escapades improvisées finissent généralement par aboutir dans un centre-ville.

Portland, Trois-Rivières, Bangor, Sherbrooke, Montréal, Boston, Québec ou Rimouski, c’est indéniable, je finis ma course « downtown ».

Pourquoi ? Parce que j’aime les centres-villes. C’est là que je me sens le plus « à ma place ». Les centres-villes réussis réunissent généralement l’essentiel de ce qui me plaît dans la vie : de beaux espaces pour marcher-faire-du-vélo-ou-du-roller, des petits cafés pour s’arrêter-casser-la-croûte-lire-écrire-observer-les-passants, des espaces verts, des commerces attrayants et variés, des attraits touristiques et des lieux de consommation de culture. Des lieux vivants. Sans affreux fils électriques si possible !

Jusqu’à l’âge de 16 ans, je rêvais de devenir architecte. J’ai choisi une autre voie. Mais j’ai gardé cet intérêt marqué pour tout ce qui touche l’aménagement, surtout urbain. Quand je déambule dans un centre-ville, je prends le temps d’en étudier l’aspect visuel. Je m’attarde au « design » des édifices, des parcs, des aires de circulation, des places publiques, etc. Je prends même la peine de photographier le mobilier urbain! Bref, cela me passionne.

Et cette passion, elle est depuis toujours directement liée à mon espoir de voir un jour ma propre ville se transformer pour offrir à ses citoyens et aux visiteurs une « urbanité agréable » comparable à celle que je savoure aujourd’hui sur la rue Saint-Germain de Rimouski. Après mes études à Montréal, j’aurais pu choisir d’habiter sur le plateau Mont-Royal. Mais ce n’est pas moi.

J’suis un gars de région. Mais j’suis aussi un urbain, au sens branché du terme. Je veux les deux.

Mon séjour de sept années dans la grande ville a indéniablement contribué à façonner mon identité qui ne saurait aujourd’hui faire abstraction d’un penchant résolument urbain.  Penchant toutefois bien imbriqué dans un désir non négligeable de préserver par surcroît l’expression bien sentie du rural en moi. Ainsi donc, sans pour autant céder à la fermeture d’esprit, j’aspire à croire que ma petite métropole beauceronnne a tout ce qu’il faut (ou presque) pour éventuellement satisfaire ma quête : retrouver en région au moins une petite parcelle de l’expérience urbaine caractéristique du plateau Mt-Royal !  Bon.  J’en conviens, la cité-régionale québécoise type a encore du chemin à faire avant que semblable utopie ne se réalise.  Mais je vis d’espoir.  Les diverses initiatives de revitalisation des centres-villes et d’implantation de voies cyclo-pédestres sur le territoire m’incitent à persévérer mon idéal.  La chose est possible si on se donne la peine de penser intelligemment l’urbanisme de nos villes dans l’avenir.

Et quand je vois les résultats de tous ces palmarès de performance (gestion municipale, indice relatif du bonheur, etc.) consacrer tour à tour les Rimouski, Rouyn-Noranda, Saint-Georges et Victoriaville de ce monde, je me dis que je ne dois pas être le seul à partager cet idéal !