La tête pleine de rêve de simplicité, de calme, de feux de camp, de cousinage, de baignades dans les lacs, de marches dans la rivière, de pêche et autres agréablitudes, je suis retournée vivre dans mon village l’été dernier. Village que j’ai quitté en 5e année. Au lendemain de l’Halloween. Vendredi présente et lundi bureau de classe vide. Je me demande comment mes petits amis de l’époque ont trouvé ça. Au moins, ce n’est pas comme si j’étais morte! On avait dit qu’on s’écrirait des lettres et on a pleuré à chaudes larmes en échangeant nos photos d’école et nos adresses postales. Bien avant l’époque MSN!

Nouveau mois et nouvelle école dans une nouvelle ville. Fière campagnarde, je me devais de faire découvrir à ces citadins que les gens de la campagne avaient autant de culture, de connaissance de la mode que la population des villes! J’ai dû expliquer que nous n’avions pas tous des fermes et que nous avions autre chose que des magasins généraux! Même si c’est un peu vrai pour certains coins…

J’ai dû aussi m’adapter à cette réalité que d’avoir des voisins. Vivre en appartement sur un boulevard passant ce n’est pas la joie. Je m’ennuyais de ma grande maison ancestrale (construite par mon arrière-arrière-grand-père) et du champ qui la séparait de chez mes cousines! On passait nos étés à y jouer, à y cueillir le plus gros bouquet de fleurs du monde, à manger des petits fruits sauvages et à s’occuper des chevaux de mon oncle.

Mon enfance se résume à une image : une petite fille, les cheveux au vent dans un champ brillant de soleil.

D’ailleurs, sur cedit boulevard il y avait un feu de signalisation avec un bouton pour piéton! Tout près de ma maison en plus. Quelle construction incroyable! Mais je n’avais pas de raison de l’utiliser. Alors je n’avais jamais vu le petit bonhomme apparaître. Il me sembla que je devais vérifier s’il fonctionnait pour la sécurité des piétons de mon quartier.

Alors je fonce. Je pèse, trop fort. Je regarde. Rien. Ah si! Voilà! Et une voiture qui s’arrête. Un conducteur qui me dévisage. Un conducteur qui me fait signe d’y aller. Moi de lui faire comprendre que non, pas besoin. Lui de sembler exaspérer. Et de baisser sa fenêtre. Et de me dire d’un ton fâché que je lui fais perdre son temps avec mes sottises. Et la lumière de devenir verte et mon petit bonhomme de disparaître. Même pas eu le temps de compter combien de secondes on avait pour traverser! Expérience ratée.

Croyez-vous qu’il aurait accepté mon explication que j’étais en mode découverte ou m’aurait-il trouvé simplement un peu pauvre d’esprit si je lui avais dit?

Après quelques années, j’ai pris un pli de la ville qui est de ne pas saluer les passants croisés. Imaginez, vous êtes sur la rue St-Jean ou sur Ste-Catherine et vous dites « Salut! », à tout le monde. Des « Saluts! » incessants. Incapable d’avoir une conversation tellement il y a des gens. Constamment interrompu par la marée humaine. De grandes vagues de « Salut! » qui vous étourdissent, car vous ne savez plus où donner de la tête!

Dans mon village, que tous se connaissent à ces avantages! Disons que pour les parents c’est moins stressant. Si tu ne sais plus où est passé ton enfant, 2 ou 3 coups de téléphone à des madames dans le village et il y en a sûrement une qui l’a vue passé avec des petits amis les mains collantes de Mr. Freeze et la bouche bavante de bonbons surets à 1 cenne.

Durant encore quelques années je me suis ennuyée de cette liberté.

Rendue jeune adulte j’ai expérimenté autre chose : Être raccompagnée à pied par un joli jeune homme du bar jusqu’à la maison, ça fait que tu reçois un appel de ta grand-mère qui voulait savoir avec le petit-fils de qui la coiffeuse t’a vue passé à 3 h du matin…. Ouf!