Si mon enfance et mon adolescence ont été jalonnés d’événements et d’épisodes de vie reliés à la campagne, mes origines citadines et mon appartenance culturelle à ce cadre de vie ne pouvaient laisser présager l’attrait que les espaces ruraux allaient exercer sur ma vie personnelle et mes orientations professionnelles. Et pourtant ! Très tôt j’ai pris une option sur la vie rurale par l’acquisition d’une maison de campagne, utilisée au départ comme résidence secondaire. Un choix de cœur qui allait s’avérer une première étape dans un parcours progressivement dédié au Québec rural.

Ce fut la période de La Bellangerie à Saint-Hippolyte, à quelque soixante kilomètres au Nord de Montréal, vécue en deux temps, de 1969 à 1971, puis de 1973 à 1979 au retour d’Angleterre. La Bellangerie s’avéra l’incubateur d’engagements personnels et professionnels résolument articulés à la vie rurale et agricole et à leur dynamique d’évolution : le creuset de réflexions et d’actions qui allaient se poursuivre sur plus de quarante ans.

Cette « métamorphose » de l’urbain au rural, je la vivais en couple d’abord, puis en famille, par nos activités, nos conversations, nos lectures, nos engagements sociaux. Sans l’accompagnement de mon épouse Francine qui partageait ces orientations de vie avec enthousiasme et créativité, et plus tard celui de la participation joyeuse de nos enfants à nos activités rurales et agricoles, l’aventure n’aurait pu aller très loin.

Une seconde étape de ce parcours allait s’amorcer à l’été de 1979, alors que nous emménageons dans une autre ferme, que nous appellerons Chantemerle, sise dans la municipalité rurale de Saint-Mathieu-de-Rioux, près de Trois-Pistoles, dans la région du Bas-Saint-Laurent, à plus de 500 kilomètres de Montréal. Ici seront réunies, progressivement, les conditions de l’amalgame de la vie rurale, de l’activité agricole et de la science de la ruralité. Cette ferme deviendra un véritable laboratoire à ciel ouvert d’observation et d’analyse de la problématique de dévitalisation des villages et des efforts à déployer pour vaincre cette marginalisation.

Le texte qui suit est le récit de L’étape de La Bellangerie .