Je ne pourrais pas dire que je suis un gars chanceux.

Mon nom ne sort que très rarement dans les tirages. Je ne crois pas avoir déjà gagné plus qu’une participation gratuite ou le montant de ma mise avec un 6/49 ou quelque autre loterie du genre. Même au golf, je ne profite pratiquement jamais d’un bond favorable. Ou encore, si ma balle se dirige droit dans le bois, vous pouvez parier qu’elle va s’y engouffrer comme du monde, alors que les balles de mes partenaires, elles, semblent toujours frapper un arbre et dévier directement dans le fairway.

Ça, c’est pour les choses pas importantes de la vie. Pour le reste, par contre, je dois dire que je suis très chanceux. On pourrait même dire mardeux. Né sous une bonne étoile, comme disent les plus vieux.

J’ai des bons parents, toujours là quand j’en ai besoin. Une femme belle, bonne et toujours aux p’tits oignons. Une petite fille de six mois, belle comme tout et en parfaite santé. Je n’ai jamais crevé de faim et je n’ai jamais eu froid l’hiver. Et, surtout, depuis quelques années, j’ai une job steady pis un bon boss.

Depuis maintenant trois ans, j’enseigne à la Formation générale des adultes. Je me suis promené pas mal entre Senneterre, Val-d’Or et même Kitcisakik (un village algonquien à 100 kilomètres de chez moi, dans l’Parc).Cette année par contre, je suis enfin embarqué sur la liste de rappel et j’ai une tâche pleine à cinq minutes de chez nous. J’ai le privilège d’enseigner à des jeunes et à des moins jeunes qui ont tous fait le meilleur choix de leur vie : celui de ne pas lâcher l’école à 16 ans, ou encore d’y revenir, à 25, 30 ou 40 ans, après plusieurs années de décrochage. Je vous laisse imaginer le genre de relations que ça me permet d’avoir avec eux. Ce sont des gens généralement très conscients de la réalité dans laquelle ils vivent. Ils ont souvent eu des passes pas faciles, mais leur parcours tumultueux leur a fait comprendre que l’éducation était souvent le remède de bien des maux. Et moi, je suis payé pour qu’ils atteignent leur but. C’est malade.

Mais ils n’ont pas que moi. Vraiment pas. La FGA, c’est toute une équipe de profs, de conseillers pédagogiques, de secrétaires et une direction. Je pourrais vous faire l’éloge de mes collègues toute la journée, mais je voudrais vous parler d’une personne plus particulièrement. Je voudrais vous parler de celui qui m’a donné ma première vraie chance dans le (pas toujours) merveilleux monde de l’enseignement. Il m’a donné mon premier contrat de remplacement, il y a quatre ans, en histoire de secondaire un. Enfin! je n’enseignerais plus de maths ou d’éducation physique. Un prof d’histoire qui enseigne l’histoire, j’en ai eu la preuve, ça se peut! Et un an plus tard, c’est ce même directeur qui m’a demandé si l’enseignement aux adultes m’intéressait. Mets-en.

Mais c’est ce même directeur qui vient de nous annoncer qu’il partait à la retraite dans moins de deux mois.

En passant, si vous pensez que je suis en train de le téter en écrivant ce texte : détrompez-vous. Il s’en va, donc il est trop tard pour ça. Avoir su, je l’aurais peut-être tété plus avant, par exemple…!

Bref, en enseignement, on se fait charvoyer d’un bord pis d’l’autre. En trois ans, j’ai enseigné au primaire, au secondaire, à l’université et aux adultes. J’ai enseigné l’anglais, l’histoire, le français, les maths, l’édu et les sciences. Mais ça nous fait rencontrer plein de gens. Des étudiants, des collègues pis des boss. Certains avec qui ça clique, d’autres avec qui ça clique moins. Et certains qui nous marquent.

Bonne retraite, m’sieu l’directeur!

 

SIMON-LE-MÉCÈNE

Chose promise, chose due. Grâce à votre générosité, j’ai pu faire un don d’un montant plus que respectable à la Société d’histoire de Senneterre. 574 piasses! Ils vous remercient du fond du coeur!

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